de Gautier » 31 Aoû 2009 00:28
Bonjour,
La question est intéressante mais vaste et complexe, et souvent objet de débats et polémiques entre historiens. Et ta question n'est peut-être pas assez précise.
J'apporte quelques éléments de réponse, au cas où la question t'intéresse encore.
Pour établir des hiérarchies, il faut pouvoir disposer de critères, tels que puissance politique et militaire, richesse, titulature, etc., qui s'appuient sur des données (or les sources sont très rares et souvent très laconiques vers l'an mil).
Ma réponse ne peut donc s'appuyer que sur une vision assez théorique. Mais on peut reconstituer la hiérarchie sociale réelle de cette époque dans les grandes lignes sans trop se tromper.
Il faut déjà différencier ecclésiastiques et laïcs, nobles et non-nobles, monde des campagnes et monde des villes. Et au sein des ecclésiastiques, différencier le clergé séculier du clergé régulier.
Avant la vision tripartite de la société médiévale, formulée par l'Eglise au début du XIe siècle, qui différenciait ceux qui prient (clergé), ceux qui combattent (noblesse)et ceux qui travaillent (paysans), les deux premiers ordres dominant le troisième (qui formait l'essentiel de la population), la distinction reposait surtout sur l'opposition ecclésiastiques (et parmi eux moines et clercs, les premiers étant considérés supérieurs)/laïcs (jugés inférieurs aux premiers, mais là encore, à cette époque le discours émane de l'Eglise elle-même).
Pour le clergé, c'est le pape qui domine. Il est même sensé diriger l'ensemble de la chrétienté, au moins sur le plan spirituel, mais veut aussi augmenter son pouvoir temporel, ce qui entraîne une longue lutte avec l'empereur (du Saint Empire Romain Germanique). Il est entouré de cardinaux. En-dessous, les archevêques dans chaque province puis les évêques dans chaque diocèse. Ensuite, les chanoines, dans leur entourage. Presque tous ces gens sont à cette époque recrutés dans la noblesse. Puis, bien plus bas, les curés dans chaque paroisse, et plus bas les chapelains (je ne rentre pas plus dans les détails). Ceci pour le clergé séculier (qui vit dans le "siècle").
Pour le clergé régulier (qui vit selon une règle), on a un abbé qui dirige chaque monastère, peuplé de moines. Une abbesse et des moniales pour les femmes (mais c'est très rare à cette époque).
Je passe sur la hiérarchie des dignités, il y a par exemple parmi les chanoines de la cathédrale (siège de l'évêché), un doyen, un trésorier, un chantre, etc.
Parmi les laïcs.
Au sommet, on a bien sûr les rois, qui ne sont que la couche supérieure de la noblesse. Au-dessus d'eux (théoriquement), l'empereur.
Ensuite les nobles. Mais à cette époque l'aristocratie ne s'est pas encore constituée en une noblesse reconnue et quasiment fermée. Ducs, marquis, comtes, vicomtes, pour la noblesse titrée. Ces titres, hérités du Bas-Empire romain, correspondent encore à une fonction précise, mais qui se patrimonialise : des dynasties d'héritiers se créent dans un territoire donné qu'ils commandent, et deviennent presque indépendantes. Les principautés territoriales se forment vers cette époque. En-dessous d'eux, beaucoup plus nombreux, les seigneurs châtelains, et plus bas, les chevaliers, qui sont leurs vassaux. Je simplifie à l'extrême.
En-dessous, les non-nobles, bourgeois et paysans.
Les bourgeois sont très peu nombreux, car les villes sont encore rares et petites. On trouve les marchands, peu puissants car le commerce (re)commence seulement à prendre son essor, puis les artisans.
A la campagne, où vit l'immense majorité de la population, on trouve essentiellement des paysans. Il faut différencier libres et serfs, mais ces derniers sont parfois plus riches que les premiers.
Cette hiérarchie n'est pas figée. Les mouvements d'une catégorie à l'autre ne sont pas exclus, il existe des ascensions sociales. Des paysans viennent vivre en ville, des fils cadets de nobles deviennent souvent moines ou chanoines, un petit seigneur peut hériter d'un comté par mariage, un chanoine peut être choisi comme évêque, etc.