J’ai bien aimé ce film, plus sans doute pour le côté visuel que pour l’aspect historique, mais il y avait tellement de chausses-trappes dans l’épopée historique qu’il me semble que le père Ridley s'est drôlement bien débrouillé.
La guerre en Irak, la montée récente et dramatique des fanatismes religieux. .. Il marchait sur des œufs et bien sûr, c'est politiquement correct et la religion catholique s'en prend plein la tronche -comme d'habitude- mais il faut avouer que ses raccourcis sont souvent justifiables.
André Larané en parle ici :
http://www.herodote.net/filmcroisades.htm
Le père Larané exagère un peu, par exemple il n'est pas vrai que Balian fait chevaliers en masse les habitants de jérusalem. Il arme chevaliers seulement les jeunes fils de chevaliers de 14 ans ET quelques riches marchands... ça veut tout dire, ce n'était pas du tout un concept démocratique comme le laisse entendre le film mais juste un assouplissement des règles devant l'urgence...
Par ailleurs concevoir le roi Beaudouin IV sans références religieuses est une totale ineptie pour l’un des régents les plus pieux.
Devant Keret (?) il ne négocie pas avec Saladin la punition de Renaud de Chatillon (bandit authentique) mais il arrive à la tête de son armée et Saladin s'enfuit sans l'attendre !
Mais bref, ces détournements de l'histoire sont crédibilisés si on comprend le souci de l'auteur de figurer les rapports chevaleresques qui existaient de source sûre entre Baudouin et Saladin, l'écart de mentalité entre les résidents francs et les croisés fraichement débarqués qui ne cherchaient qu'à casser de l'infidèle...
Tout ce que je peux reprocher c'est :
- montrer l’adoubement comme dissocié d’un rite chrétien
- montrer Gui de Lusignan comme un vrai méchant de cinéma alors que la réalité était bien plus nuancée : c’était un très bel homme fat, inconsistant et influençable
- le discours de Balian aux habitants de Jérusalem surréaliste et anachronique
- le fait de ne pas montrer que le royaume Franc s'est établi sur la division de leurs adversaires, l'un réclamant fréquemment le secours des Francs contre ses coreligionnaires (eh oui ! politique avant tout)
- que les ordres de chevalerie et les marchands des villes d'Italie se sont extrêmement mal comportés (des accapareurs avides de richesses) et sont pour une grande part responsables de la chute du royaume...
- la scène finale mais je ne peux en dire plus pour ne pas dévoiler…
Par contre, ce film fera connaître cette figure fantastique qu’a été Beaudouin IV et ce n’est que justice.
Du point de vue purement cinéma, c’est du grand Ridley Scott, de la taille de "Gladiator" ou de "Blade runner". Mais n'est pas Russel Crowe qui veut ! Ce gentil Bloom a joliment interprété l'elfe auparavant mais... le côté diaphane lui est resté dans ce film !
Et effectivement il ne fait pas le poids devant Neesom et Irons, c'est clair. Ceci dit tout n'est pas de sa faute car son rôle est mal étudié : il passe directement de forgeron de village atteint de mutisme à celui de stratège chef de guerre et entraîneur d'hommes alors que rien dans le scénario ne nous dit comment il progresse et apprends !
Ma source : "L’épopée des croisades" de René Grousset