Je voulais mettre ça en réplique ailleurs mais c’est peut-être mieux d’en parler en tant que sujet à part entière :
Un rappel utile sur la torture en occident, à des fins judiciaires :
Si en Grèce elle n’était pas permise pour les citoyens, elle était indispensable pour les esclaves témoignant en justice. Si le principe a été repris par Rome, l’augmentation du nombre des hommes libres à partir du IIIe s. fera que les exemptions seront beaucoup plus rares.
L’Eglise condamna formellement la torture (concile de Rome en 384). De toutes façons l’ordalie comme pratique judicaire, qui laissait à Dieu la désignation du coupable, rendait l’aveu inutile.
C’est en 1252 qu’elle fut autorisée de nouveau par une bulle papale d’Innocent IV, soit 23 ans après la création de l’Inquisition. On aura bien donc noté que la torture judiciaire –fait peu connu- n’a pas été pratiquée pendant la majeure partie du MA.
Mais avec l’instauration de la procédure inquisitoire, les clercs décèlent une faille dans leur procédure, dans leur obsession d’obtenir l’aveu dans un procès fiable et incontestable de leur point de vue.
Ils l’assortent cependant de conditions : de torture que s’il y a début de preuve, les aveux obtenus ainsi doivent être renouvelés librement, la vie ne doit pas être mise en danger de même qu’aucun membre ou organe, les enfants, les femmes enceintes et les vieillards en sont exclus, les clercs seront traités avec moins de sévérité…
Comme par hasard, le retour de la torture correspond avec celui du droit romain… On va dire que c’est une obsession chez moi ! Ceci dit entre ça et l’ordalie…
Mais ce qu’il y a d’étonnant c’est que l’ordalie "fonctionnait" plus souvent qu’on ne pourrait le croire ! Il paraîtrait que nombre d’accusés ayant demandé cette épreuve se sont sortis indemnes du port d’une pièce de métal chauffée à blanc, pièce qu’ils devaient porter sur quelques mètres. J’ai lu ça dans mon bouquin sur Guillaume de Normandie mais je n’arrive plus à retrouver le passage.
L’ordalie, d’origine germanique, fût combattue par l’Eglise ou au moins adoucie et encadrée religieusement. Le recours à cette pratique était un degré supérieur au serment purgatoire de l’accusé, que pouvait contester la partie adverse. Elle avait lieu soit sous forme individuelle soit sous forme d'affrontement en tant que duel judiciaire, entre l'accusé et le plaignant.
Elle fut officiellement interdite après le concile du Latran de 1215. Comme quoi le XIIIe siècle est vraiment une période charnière dans l’histoire de la justice.
Essentiel des sources dans le dictionnaire Mourre.