Edit Admin : Je m'excuse de la division du sujet, mais c'est juste pour recentrer le débat de l'autre fil que j'en donne un nouveau à celui-ci.
Rod
Pour revenir sur ce sujet qui a déjà fait couler beaucoup d'encre, je vous propose une vision entièrement historique du mythe de Marie-Madeleine.
Marie-Madeleine n'a jamais existé. C'est un personnage créé par l'Eglise médiévale pour incantifier la "femme" au VIIe siècle (Pape Gégoire 1er).
Elle est "construite" à partir de trois personnages du nouveau testament :
- Maria Magdalena, fille aus sept démons
- Marie de Béthanie, soeur de Lazare et de Marthe
- La prostituée de Naïn, sauvée par Jésus, qui avait lavé les pieds du Christ, essuyés avec ses cheveux.
La confusion est rendue possible par le témoignage de Luc à propos du repas de Jésus avec Simon, juste avant d'évoquer la fille aux sept démons.
Pourquoi est-elle inventée ?
Pour réaliser une figure composite. Afin de pouvoir dire (écrire) des choses qu'on ne pourrait pas dire autrement.
Notez que Marie-Madeleine est toujours représentée avec de longs cheveux dénoués, marque des prostituées à l'époque du Christ. D'ailleurs c'est la clé du personnage de Marie Madeleine. Pourquoi a-t-elle les cheveux si longs ?
Marie-Madeleine, c'est la sainte "spécial femmes". Plus que cela , c'est la troisième femme d'une trinité femelle, les deux autres étant Marie (mère de Jésus) et Eve, la toute première.
Sans Marie-Madeleine, la femme croyante ne peut pas s'identifier. Elle n'a pas de modèle.
Marie est trop parfaite pour être imitée. Pas un modèle, un dogme (immaculée).
Eve est la faute incarnée, la malédiction (les règles des femmes en anglais se disent curse of Eve).
Bref pas un modèle non plus.
Marie est le contraire, le simétrique de Eve. D'ailleurs l'ange Gabriel salue Marie en lui disant AVE. Pas par hasard ce salut inverse de EVA....
Donc on a un extrême (perfection immaculée) et l'autre (fautive absolue).
Pour les femmes, qui forment une part importante de la chrétienté (...) deux choix possibles : soit être une traînée soit une sainte (vie monacale chaste), pas de milieu. Donc pas d'identification possible au sein de l'Eglise Chrétienne. Impossible de continuer comme ainsi, il fallait faire quelque chose.
Donc on crée ce troisième personnage. Avec Madeleine, elles ont un modèle : la "pute" au grand coeur. Prostituée d'abord, puis sainte. Elle incarne le point de passage entre Eve et Marie. Elle incarne aussi l'étendue du possible pour une bonne chrétienne.
Parce qu'elle est différente des deux, mais aussi par ses points communs.
D'Eve, elle a la séduction professionnelle, de Marie, elle porte son prénom (pas de hasard). Elle vit dans l'ombre du Christ, pleure pour lui, est la première à laquelle le Christ paraît ressuscité, bref, sans les cheveux longs on confondrait bien les deux (Marie et Marie-Madeleine).
On voit donc la construction d'un triangle sémiotique : comme elle n'est ni Eve ni Marie, mais qu'elle ressemble aux deux, Madeine articule l'immaculée à la souillée, la pure à l'impure. Elle est le chemin, la voie, la Porte qui permet aux filles d'Eve de devenir la fille de Marie. Suffit de se convertir et hop, le tour est joué.
Bon, et les cheveux alors ?
Ben c'est simplement le signe de la conversion.
Les longs cheveux rappellent qu'elle les a dénoués pour essuyer les pieds du maître. C'est aussi les cheveux longs de la pénitente, si longs que dans le désert, ils lui tombent aux pieds.
Il y a aussi le thème de l'intimité. Une femme y dénoue ses cheveux. Mais pas dehors. Jusqu'au XXe siècle, on ne sort pas "en cheveux", sinon, cela démontre l'attrait pour une vie dissolue, voire, bien pire. Sauf les jeunes filles, pucelles.
Donc les longs cheveux de Madeleine rappellent son impudeur passée, et sa pénitence résumée dan la phrase latine "puella sed non virgo" : jeune fille mais pas vierge. Encore un pont, un passage.
Bref trois images de femme, mais une restriction sévère de moralité sociale.
L'ambivalence prostitution/sainteté persiste dans le personnage de Marie-Madeleine qui n'est qu'une continuité plutôt qu'une rupture.
Dans l'église catholique encore aujourd'hui, une femme ne pe peut être q'une sainte (chaste, une soeur) ou une femme perdue (qui est bien punie puisqu'elle aura le SIDA).
Tout cela pour dire que la Marie-Madeleine de ce livre est une invention du VIIe siècle à des fins de "transfert psychologico-religieux" et que donc tout ce qui est bâti autour de ce personnage ne repose sur aucune base historique sérieuse.
Pardonnez-moi si j'ai digressé.
Lire : les Evangiles selon Luc et Matthieu
Daniel Assasse - On n'y voit rien - Folio Essais 2003